ONU: «La crédibilité des journalistes dénigrée»
La défense des journalistes et de la liberté d’expression fait l’objet d’une attention particulière à l’ONU depuis plusieurs années. Le Conseil des droits de l’homme vient d’adopter une nouvelle résolution à la clôture de sa 39ème session à Genève, vendredi 28 septembre. Elle engage fermement les Etats à faire leur possible pour prévenir la violence, l’intimidation et les attaques contre les journalistes. Le texte mentionne notamment une douzaine d’initiatives que les gouvernements devraient prendre à cet effet. Cela va de l’information publique sur l’importance des médias, à des mécanismes permettant aux journalistes menacés de trouver du soutien (notamment les femmes), en passant par la formation des forces de police et de l’armée, ou la mise en œuvre d’un cadre légal et l’application des nombreuses résolutions déjà adoptées en la matière au niveau international.
Bon nombre de positions, résolutions, plans d’action, recommandations…
Une semaine plus tôt, le Haut Commissariat aux droits de l’homme avait justement présenté au Conseil un aperçu des mécanismes disponibles «s’agissant d’assurer la sécurité des journalistes, notamment des mécanismes de prévention, de protection, de suivi et de plainte». Ce rapport répond à un mandat donné par ce même Conseil en 2016, afin d’analyser l’efficacité de ces mécanismes. En plus des nombreuses enquêtes menées par divers experts du Conseil des droits de l’homme, le rapport mentionne une longue série de positions, résolutions et autres recommandations prises par l’Unesco, l’Assemblée générale des Nations Unies, Conseil des droits de l’homme, les organisations intergouvernementales, pour ne citer que les plus importants.
Pour donner une colonne vertébrale à ses actions en la matière, l’ONU a dressé un Plan d’action sur la protection des journalistes et la question de l’impunité en 2012. Sous la houlette de l’Unesco ce plan milite pour une action et une coordination transversale à tous les acteurs impliqués, à commencer par les Etats et les Nations Unies. Il aborde six domaines: la sensibilisation, la surveillance, la formation, l’établissement de standards et de règles, la création de coalitions entre différents acteurs et la recherche académique. Une trentaine d’organisations professionnelles dans le monde sont partenaires de ce plan d’action.
L’ensemble de ces textes et résolutions n’a pas empêché que, de janvier 2005 à décembre 2016, l’Unesco a recensé 827 assassinats de journalistes, auxquels s’ajoutent d’innombrables cas d’enlèvements, intimidations, emprisonnements et autres harcèlements.
«Une question prioritaire»
Le rapport du Haut Commissariat cité plus haut prend acte que la sécurité des journalistes «est devenue une question prioritaire» qui est désormais intégrée dans les politiques et les activités de l’ONU et d’autres organisations internationales. Mais il ne peut que constater l’augmentation des attaques contre les journalistes, «ce qui soulève des questions légitimes quant à l’efficacité» des mécanismes mis en place à tous les niveaux. Il prône premièrement un renforcement du Plan d’action, et une meilleure coordination de tous les acteurs. Un réseau des Nations Unies des agents de liaison pour la sécurité des journalistes devrait être réactivé.
Dans ce contexte, la résolution adoptée vendredi par le Conseil des droits de l’homme – la quatrième sur ce thème – peut être considérée comme rituelle. Toutefois pour Blaise Lempen, fondateur de l’organisation Press Emblem Campaign basée à Genève, qui suit de très près ces questions à l’ONU, le fait que le thème soit abordé de manière régulière renforce l’idée de son importance. De plus, «le texte de cette résolution est plus fort et plus large que précédemment».
Nouvelle préoccupation
Une nouvelle préoccupation fait notamment son apparition, très en phase avec la scène politique américaine : la nécessaire crédibilité des journalistes dans un environnement où «la désinformation ciblée et les campagnes de diffamation pour discréditer le travail des journalistes augmente». Le Conseil se dit ainsi «alarmé par les exemples où des leaders politiques, des fonctionnaires et des autorités dénigrent, intimident ou menacent les médias (…) et sapent la confiance dans la crédibilité des journalistes».
Thursday 2 November: International Day to End Impunity for Crimes against Journalists
The world is witnessing a “downward spiral of attacks” on journalists, spurred on by hate speech even from senior politicians, two UN experts have warned. Speaking ahead of 2 November, which has been designated International Day to End Impunity for Crimes Against Journalists, the Special Rapporteurs on arbitrary, summary and extrajudicial executions, Agnes Callamard, and on freedom of expression, David Kaye, called on States to act:
“So far this year, the world has lost more than 30 journalists to targeted attacks. In addition to taking individual lives and depriving family members of their loved ones, these attacks aim to destroy the public watchdog role of journalism that is essential to democratic society.
The attacks on journalism are widespread and deplorable. Assaults on investigative reporters, including independent journalists, freelancers and bloggers, undermine official accountability and help entrench corruption and other abuses of power.
When authorities fail to follow up such attacks with independent and impartial investigations that can bring perpetrators to justice, the killers and their allies achieve their objectives.
The attacks need to stop. So too does the public demonization of reporting and specific media outlets and reporters by political leaders at the highest levels.
Whipping up anger and distrust, or redefining journalism as a crime akin to terrorism, are steps on the path to physical attack. The end of impunity begins with a commitment at the most senior levels to stop the hateful rhetoric, end detentions and prosecutions of journalists, and take steps to bring all attackers to justice.
Our societies cannot afford to continue this downward spiral of attacks against journalists. We urge all States – in word and action – to devote resources to reverse this trend.”
Ms Agnes Callamard is Special Rapporteur on extrajudicial, summary or arbitrary executions;
Mr. David Kaye is Special Rapporteur on the promotion and protection of the right to freedom of opinion and expression.
Themenbezogene Interessenbindung der Autorin/des Autors
Aucuns. L'auteur est correspondant au Palais des Nations à Genève.